Première preuve de concept in vivo dans la dystrophie myotonique de Steinert, une maladie neuromusculaire
L’équipe d’Ana Buj Bello, chercheuse à Généthon, a réalisé la première preuve de concept d’une approche CRISPR-Cas9 dans un modèle murin de la dystrophie myotonique de Steinert, la plus fréquente des maladies neuromusculaires de l’adulte.
En effet, grâce à cette approche d’édition du génome, les triplets CTG dont la répétition dans le gène DMPK sont responsables de la maladie, sont « coupés » et éliminés, et les agrégats d’ARN toxiques sont diminués dans les cellules des modèles testés. Forts de ces résultats encourageants publiés dans Molecular Therapy le 5 juin dernier, les chercheurs vont poursuivre leurs travaux pour traiter le corps dans son ensemble.
La dystrophie myotonique de Steinert (DM1) est la plus fréquente des dystrophies musculaires de l’adulte. D’origine génétique, sa prévalence est estimée à 1/8.000, soit environ 7 à 8000 malades, et se caractérise principalement par une difficulté au relâchement après la contraction (myotonie) et une faiblesse musculaire progressive liés à une mutation dans le gène DMPK. Cette anomalie génétique consiste en une augmentation du nombre de répétitions d’une petite séquence d’ADN de trois nucléotides, le triplet CTG, qui se traduit par une accumulation de l’ARN DMPK muté dans le noyau des cellules, conduisant à une perturbation du fonctionnement normal des cellules. Il n’existe aujourd’hui aucun traitement curatif pour cette maladie neuromusculaire.
Dans cette étude, l’équipe d’Ana Buj Bello, en collaboration avec les équipes de Denis Furling à l’Institut de Myologie, et Geneviève Gourdon, Institut Imagine, a développé et évalué une approche de thérapie génique utilisant des ciseaux moléculaires CRISPR-Cas9 dans un modèle cellulaire et dans un modèle murin (DMSXL) de la maladie :
- Dans le modèle cellulaire : l’équipe a identifié des ARN guides qui permettent de cibler des séquences d’ADN autour des triplets CTG du gène DMPK, et démontré que la protéine Cas9 permet de supprimer cette partie du génome et d’éliminer ainsi les agrégats d’ARN toxiques dans le noyau des cellules.
- Dans le modèle murin : l’équipe a utilisé cette même technologie en intramusculaire, grâce à de vecteurs de thérapie génique (AAV9) pour transporter Cas9 et les ARN guides. Une diminution des agrégats toxiques d’ARN DMPK muté a été observée dans le noyau des cellules musculaires des souris malades.
« Après plusieurs années de travail, nous avons pu démontrer que le système CRISPR-Cas9 fonctionne dans le muscle squelettique pour la maladie de Steinert. Ces résultats représentent une première étape très encourageante, nous devons maintenant optimiser cette approche afin de corriger l’ensemble des tissus atteints par la maladie », souligne Ana Buj-Bello, auteure principale des travaux.